Alice fronce les sourcils. Comment ça, ils sont en vacances, pas du tout elle se lève demain ?! Enfin ; oui, d’accord, Max n’est pas encore à gagner sa vie en travaillant cinq jours par semaine, elle va à l’école, on est en vacances. Mais du coup ? « Qui la garde ? » Au jour le jour, si Mamie n’est pas là, si Papa et Appa travaillent… ?! « Bon bah fantastique, petit stage en entreprise, les clients seront ravis de payer moins cher du travail d’enfant. » Elle a l’humour qu’elle a, inspiré de ses meilleurs (pires) modèles dans l’adelphie. Elle soupire tout de même, un poil soulagée que Nat ne soit pas littéralement passé par la fenêtre (c’est qu’Emile n’est pas prêt à être père célibataire) (et qu’il lui manquerait, aussi) et attrape elle aussi un petit bout de son frère pour l’étreindre.

C’est bien parce qu’elle l’aime qu’elle veut cafter.

Elle lève tout de même les yeux au ciel lorsqu’il (ose !) dire qu’elle le fera pas, et rattrape ses clés pour les lui montrer mais les garde (un peu idiot de se faire enfermer à l’intérieur). Il touche un peu trop juste, comme d’habitude. « Mais… » Pas moyen de savoir si elle proteste parce qu’elle a un truc à redire ou parce qu’il abuse. Sa gorge se noue, malgré elle ; elle aurait envie d’aller retourner faire semblant de dormir à côté de Max pour n’pas répondre. « Uh- » Elle y pense, que Maman serait contente et que Papa n’dirait trop rien, qu’elle n’est pas la première d’eux à se trouver quelqu’un ; elle ne sait pas de quoi elle a peur, véritablement, de ses sentiments, du fait que Liesel soit quelqu’un, que tout est trop frais et peut-être que rien n’est sûr… Alice se frotte un sourcil, s’échappe un peu de la chaleur d’Anatole pour pouvoir s’éloigner au moins un peu. « Et toi… ? Tu es content pour moi ? »

Elle suppose que ça suffit, elle suppose que d’autres lui diront pareil, elle suppose qu’elle dire pareil à d’autres et que ses doutes sont plus liés à ses propres insécurités qu’autre chose. Il n’empêche que ça reste plus facile dans ses rêves. Elle a un meilleur contrôle sur presque tout. Alice se contente d’un soupir, une vague de satisfaction soulagée pour lui réchauffer la poitrine. Elle hoche vite la tête à l’impatience de son frère ; il aurait pu discuter du prochain repas en famille et de qui amène quoi qu’Anatole aurait eu la même intensité et le même enthousiasme. L’aîné a l’esprit trop occupé avec sa carte vitale et son frigo à enterrer et son canapé pourri pour vraiment s’inquiéter des affaires sentimentales de l’adelphie. « Et moi le loup, le renard, la belette… » Elle se permet de le pousser, vers la sortie et non vers la fenêtre. Toujours pas convaincue qu’il viendra réellement aux petites heures du matin et qu’elle va devoir s’occuper de Max… On ne sait comment. Mais c’est un problème pour demain.