Un bref calcul se fait — Alice a, déjà, du mal à suivre les années qu’elle a elle, et il faut tout le temps qu’elle fasse un point pour ses frères et sœurs. Puis elle hoche la tête. La prochaine décennie, c’est loin, son dos n’y survivra pas, et si Max veut ramener des copains ou copines à la maison… Ils vont se moquer du canapé, il pense pas à ça ?! « Je suis sérieuse, Nat… On pourrait t’offrir ça. » A eux tous, ils peuvent bien se débrouiller pour une dépense de ce genre. La réflexion est déjà lancée, elle pourra bien organiser ça, faire quelques repérages, soudoyer les adelphes…

Son frère veut une histoire qui fait peur, elle souffle un rire. « T’en as pas assez, au boulot ? » Elle change de section pour scroller ; elle n’aime pas les histoires de fantôme car il s’agit du quotidien de Léandre, elle évite les disparitions et autres meurtres que c’est trop proche de leur réalité. Qu’est-ce qui peut faire peur à Nat ? Elle ferme l’application, ouvre un onglet sur internet. Elle répond distraitement par l’affirmative lorsqu’il lui demande si elle travaille demain, attrape machinalement un coussin pour essayer de caler la nuque du gueux avant de reprendre les quelques caresses qu’elle se permet dans ses cheveux. Elle a un sourire heureux sur les lèvres. Elle ne s’attendait pas à être tante un jour, avec Nat, mais… « Mais est-ce que je suis ta soeur préférée ? » Elle demande, un peu taquine. ((« Je l’aime, aussi. »))

Alice pouffe un rire. « Parce qu’ils oseraient pas se moquer de toi, Maître Yoda, tu es trop parfait. » Parce que les enfants sont un peu stupides, parce que le canapé est vraiment naze, parce qu’ils ne trouveront pas d’autre sujet de conversation et que forcément ça tombera dessus ? (Avant possibles bécotements ?!) Elle fait attention à caler correctement Nat, reste songeuse sur ‘qui fait peur’, quémande un peu plus d’affection. Mais c’est bien la pire personne à qui demander de trancher. « T’es injuste… T’es mon frère préféré toi. C’est pas Léandre qui me laisserait pieuter son lit. » (Et bien sûr qu’elle en dira autant à au moins l’un et peut-être l’autre s’il est dans un bon jour avec un autre argument du même genre.) Elle plisse un oeil, cherchant à savoir si ce qu’il dit fait sens, (non), laisse tomber d’un haussement d’épaules.

Elle a toujours son sourire aux lèvres, aux attentions. « Bon. » Elle commence quand elle arrête enfin de scroller. « Tu es sur le point de tomber amoureux de The Rock dans un salon de thé, tu es prêt ? »

Alice ne dit rien sur les chats — ce n’est pas qu’elle ne les aime pas, qu’elle en a peur, qu’ils la dérangent. Elle n’y est juste pas particulièrement attachée, ne s’attendrit pas pour ça, puis ça fout des poils partout. Elle a la même opinion pour les chiens et, de manière générale, les animaux. (Tant qu’elle n’a pas la même opinions pour les humains…) Elle hume, semblant de réponse à la question. « Mmh. C’est aussi une histoire où tu es le héros — c’est écrit à ‘tu’, pour l’immersion. » Et même sans ses explications, Nat a l’air de s’y connaître… un… peu… trop… Son visage se tord dans une expression de dégoût, ça gronde même au fond de sa gorge. « Bon Dieu… Je ne veux pas savoir ce que tu lis dans la tête des gens. » Il faut vraiment qu’il considère les livres audios, plutôt que d’écouter les pensées autour de lui. « Non, c’est un meet-cute on ne peut plus normal. » Elle rit un tout petit peu de taper presque juste niveau histoire d’horreur, mais soupire rapidement en croisant le regard de son frère. « Je crois que vous ne vous embrassez même pas, toi et The Rock, à la fin. » Il y a certaines images qu’elle aime lui envoyer pour l’emmerder, mais il y a certaines choses qu’elle n’osera jamais penser ou dire ou faire. Un minimum de respect.

L’histoire commence plutôt bien. Nat est apparemment fatigué car le travail lui demande beaucoup (plausible), il en a marre d’être seul dans son appartement New Yorkais (pourquoi pas) donc il se décide de fréquenter le salon de thé en bas de chez lui (il ne s’y est arrêté qu’une fois, pour une pâtisserie). Et bim bam boum le gérant mesure 2 mètres de haut et en fait trois de large, mais quel joli sourire, et et et et…

« Tu dors ? »

Il y a un rire un peu idiot, peut-être même moqueur, lorsque Nat aborde Emile. C’est l’image d’imaginer les deux côtes à côtes qui l’amuse, c’est l’ambiguïté de la relation entre son frère et (??! son ??) qui l’attendrit, c’est aussi penser à son ami. Elle peut éventuellement changer le nom à la lecture, si ça l’aide à s’endormir, mais… « Mmh ? » Elle questionne, perdue entre la pensée où elle hésite à reprendre et aller jusqu’à la fin ou le laisser en paix et celle où elle se demande s’il existe des Jägers reader insert. (Non que.) (Cela l’intéresse.) Alice bat des paupières, souffle du nez, et Liesel se concrétise dans son esprit, « Je devrais aller dormir. », car il doit bien y avoir mille raisons pour que ses yeux brillent.

Le portable est posé contre sa cuisse, laissé là sans même être mis en veille. Elle aurait envie de poser des questions idiotes, est-ce que tu as déjà été amoureux et est-ce que tu aimes Emile et est-ce que tu aimes Max et est-ce que tu m’aimes et est-ce que tu m’aimes même si— car les réponses ne sont pas si évidentes que ça, et elle se rassure que tout s’embrouille qu’il n’en captera peut-être rien, mais Alice ne dit rien et tend plutôt les doigts pour décoiffer-recoiffer son frère. « Tu restes dormir là, c’est ton dernier mot ? »

Paix à son dos, et peut-être à son âme — Alice hausse l’épaule droite pour témoigner de sa tristesse pour lui, mais n’insiste pas. Faudrait le re-déplier, re-lever, trop compliqué. Elle lâche un mince soupir lorsqu’il regarde l’heure, ne peut tout de même de s’empêcher de sourire. « Tes mots marchaient déjà pas au collège, Nat… » Alors, même s’il peut y rajouter un superbe tampon de police ?! Ils ont des tampons la police ? Elle n’a encore jamais eu d’amendes, mais, bref, même avec ça, pas sûre que ça fonctionne et qu’Aron l’accepte, et elle n’a pas envie de mettre dans l’embarras un autre de ses collègues. « J’ai déjà fait pire, ça devrait aller. » Elle laisse les cheveux tranquilles et passe plutôt un doigt sous le bracelet qui lui sert de canalisateur ; tout au pire, elle peut le garder cette nuit et s’assurer un sommeil court mais reposé.

Une couverture s’attrape et se pose sur Nat, elle se penche pour lui embrasser le front. « Bonne nuit. » Pour le réveil, elle sait que Max s’en chargera, pour la lumière les volets ont beau être fermés on y distingue assez pour qu’il ne soit pas complètement dans le noir, pour le reste… « Rêve bien de Dwayne. »